Une silhouette indistincte s’approche d’abord, et immédiatement, partage avec nous un temps, un moment de vie. Le corps de JIMMY plonge dans l’étrange. Seul, il raconte peut-être plus qu’une existence unique, en établissant toutes sortes de fictions qui se teintent du réel à nos portes. À qui appartient l’histoire qui se déroule sous nos yeux ? De quel(s) vécu(s) témoigne-t-elle ? Qui est – qui n’est pas – JIMMY ?
Avec JIMMY, la danse prend place dans des déploiements qui se réduisent et s’éteignent au fur et à mesure que les minutes avancent. Le solo permet d’épuiser la multiplicité des possibles qui s’essayent un à un sur scène : un geste change son cours, fait retour, se répète, sinue ... JIMMY est onde et matière en une seule fois – mouvement et physicalité liés. Dans une ambiance qui confine par moment au rêve éveillé, la danse, comme une lisière, serpente et rend poreuse la frontière entre la réalité d’un corps et les imaginaires fantômes qui en émanent.
À la fois anonyme et évocatrice, la figure de JIMMY est porteuse d’une énergie tout à fait singulière. Elle attrape notre regard et soulève quelque chose dans l’air qui retombe doucement, transpercé avant d’avoir touché le sol. Au cœur des linéarités sectionnées du mouvement, les mains de Jazz Barbé, déterminantes accroches physiques, remplacent son regard, hument l’air, forment des signes, masquent son visage et déplacent son corps dans un flux parsemé d’éclats.
Pierre Pontvianne creuse une chorégraphie, qui oscille et puise profondément dans les ressources de l’interprète, entre thème et variations, inspiré par l’intime singularité d’un corps et toujours à l’écoute des grondements sourds de l’époque. Comme un orage qui ne passe jamais loin, l’univers de JIMMY fait sien le trouble que nous pouvons ressentir quand la course du monde confine à la dystopie, quand la tranquille continuité de nos vies protégées laisse place au doute.
Solo.
Seul au sol.
Seul au milieu du temps.
Sans en toucher les bords - ou peut-être deux fois seulement.